
Pourquoi j’ai commencé la calligraphie japonaise ?
Pourquoi ne pas se lancer dans un des arts traditionnels pendant que vous séjournez au Japon ? Une belle opportunité pour apprendre avec un professeur japonais et s’imprégner davantage de la culture japonaise. C’est que j’ai fait avec la calligraphie japonaise et voila pourquoi je me suis lancée dans cette aventure.
Tout a commencé à Kyoto, en octobre 2019, dans mon école de langue d’apprentissage intensif du japonais.
Un an après, je m’initiais à la calligraphie japonaise.
Avant de partir pour le Japon, j’avais pris des cours pour apprendre les bases du japonais. Je connaissais les deux syllabaires, les hiragana et les katakana, et quelques idéogrammes simples, une goutte d’eau quand on sait qu’il en faut plus deux mille pour lire un texte.
En octobre, les enseignements commencèrent sur les chapeaux de roue : grammaire, vocabulaire, prononciation, écoute, lecture, écriture. Comprendre, mémoriser, restituer. Avec toutes les semaines, des présentations orales, des tests et des devoirs sur table. On ne s’ennuyait pas.
Le dur apprentissage du japonais
L’un des gros challenge fut pour moi d’apprendre à écrire et de retenir chaque semaine, une trentaine de kanji, les idéogrammes japonais. Si certains n’étaient pas trop difficiles, la majorité se sont avérés particulièrement coriaces. Au début, les résultats des interrogations écrites, vingt kanji à écrire en dix minutes, étaient franchement mauvais.
Entre ceux que j’avais oublié le jour de l’examen, ceux à qui ils manquaient un petit quelque chose, un trait ou ceux qui avaient était mal formés, et donc qui étaient faux, et ceux que mon cerveau avait bien voulu retenir, force est de constater que ce n’était pas évident.
En plus, ils n’étaient pas bien jolis ces premiers kanji. Mon écriture, tremblée et mal assurée, ressemblait à celle d’un enfant apprenant à écrire. Un retour en arrière. Un retour à l’école primaire en somme. La forme de mes hiraganas et katakanas n’était pas non plus au top.
Pour me souvenir de ces satanés kanji, pour qu’ils soient mieux écrits, et donc pour avoir de meilleures notes, j’ai pris le taureau par les cornes et n’ai pas compté mes heures de travail. Un jour, un étudiant plus avancé que moi, à qui je confiais mes difficultés, me dit alors : « Brigitte, tu sais, avec les kanji, il n’y a pas de mystère, si tu veux les retenir, il faut les écrire, encore et encore, jusqu’à ce que ta main s’en « souvienne ». ».
Une volonté acharnée d’y arriver
J’ai pris le conseil, si je puis dire, au pied de la lettre. Je m’y mettais le soir, de préférence, une fois terminés les devoirs de la journée. Aimant apprendre et parce que j’étais très motivée, je me suis donc mise à écrire, écrire, écrire. J’ai répété, répété, répété, tracé, tracé, tracé. Je suis passée au feutre et à l’ardoise effaçable, pour économiser le papier et pour épargner les forêts qui ne m’avaient rien fait. Tous les jours, je m’y mettais, pour tenir le rythme, et pour que cela « imprime » dans mon cerveau d’occidentale. En complément, j’ai choisi de suivre un cours optionnel de kanji pour renforcer mon apprentissage.
Et petit à petit, j’ai progressé. Les efforts ont payé. J’ai été récompensée par des bonnes notes. Et surtout, de cet apprentissage, tout de même vécu dans la douleur, est ressorti, comme sublimé, le goût simple de tracer les kanji et de s’approprier ces figures complexes qui traduisent la réalité du monde. Il fallait suivre scrupuleusement le bon ordre des traits et respecter leur ordonnancement dans l’espace. Ces figures renferment une harmonie intérieure. Finalement, je suis devenue « accro » aux kanji. Cet exercice fait journellement dans la quiétude de la nuit, avant le coucher, s’est révélé, au bout du compte, très apaisant.
Passé le premier stade des tâtonnements et une fois aguerri, évoluer dans ce monde de signes, car c’est un monde en soi, est la source d’une joie secrète et profonde. Petit à petit, c’est comme lever le voile sur un petit bout de cet univers extraordinaire qu’est la langue et la culture japonaise. Et c’est aussi un petit pas de plus dans l’apprentissage de la langue.
Vers la calligraphie
D’aimer la belle écriture à l’envie de se lancer dans la calligraphie, il n’y a eu qu’un pas. Pour m’initier, j’ai donc cherché à Kyoto un professeur. Car savoir écrire le japonais est une chose, savoir calligraphier en est une autre, même si les deux aspects sont liés. Il faut donc un senseï, un maître, un professeur, quelqu’un qui va vous enseigner. C’est indispensable.
J’ai débuté en février 2021, il y a trois mois, avec une artiste calligraphe. A la première séance, m’attendait le matériel de l’apprenti calligraphe avec des pinceaux, du papier, de l’encre. Ce fût comme une joyeuse rentrée des classes.
Calligraphie veut dire étymologiquement « belle écriture ». Une approche artistique de l’écriture.
La calligraphie me « parle », tout simplement. Elle entre en résonance avec mon aspiration à la beauté. J’aime l’harmonie qui se dégage des kanji et des compositions calligraphiques. Cet art est plus oriental qu’occidental. Si la discipline existe en chez nous, elle n’a pas pris la même ampleur que dans les civilisations persanes, arabo-musulmanes, chinoises et japonaises. Lorsque je me promène dans les rues de Kyoto, la calligraphie est partout.
Au Japon, l’art de la calligraphie fait partie intégrante de la culture classique. C’est un art majeur, avec la poésie, l’arrangement des fleurs, la cérémonie du thé ou les arts martiaux tels que le kyudo et l’aïkido. Arts ou disciplines martiales, imprégnées par le zen, ce sont des voies spirituelles.
Au-delà de la dimension artistique, s’engage avec la calligraphie, un cheminement et un travail de transformation intérieure.